Focus sur l’industrie de la défense et de l’armement

1er septembre 2025

La guerre : un mal parfois nécessaire

La Doctrine sociale de l’Église (DSE) catholique adopte une approche nuancée de la question éthique posée par la guerre. Elle reconnaît la possibilité d’une « guerre juste », mais seulement dans des conditions strictes. Le Catéchisme de l’Église catholique (§2309) précise ainsi : « L’évaluation des conditions requises pour la légitimité morale de la guerre appartient au jugement prudentiel de ceux qui ont la charge du bien commun. » 

« Il faut à la fois :

– Que le dommage infligé par l’agresseur à la nation ou à la communauté des nations soit durable, grave et certain.
– Que tous les autres moyens d’y mettre fin se soient révélés impraticables ou inefficaces.
– Que soient réunies les conditions sérieuses de succès.
– Que l’emploi des armes n’entraîne pas des maux et des désordres plus graves que le mal à éliminer. »

Pour autant, le pape Jean-Paul II rappelle avec force que : « La guerre n'est jamais une fatalité, elle est toujours une défaite pour l'humanité » (Message pour la Journée mondiale de la paix, 2000). Dans le même sens, le pape François, pour sa part, soutient que dans Fratelli Tutti (§258) : « Il est très difficile aujourd’hui de soutenir les critères rationnels mûris dans d’autres siècles pour parler d’une possible “guerre juste” », au regard des conséquences dramatiques des conflits modernes.

L’Église appelle donc, avant tout, à œuvrer pour la paix et la justice, considérant la guerre comme un ultime recours.

L’investissement dans l’armement à la lumière de la DSE

La Doctrine sociale de l’Église enseigne que toute activité économique doit viser le bien commun et respecter la dignité humaine. Le Compendium de la DSE (§508-509) avertit : « La course aux armements est un fléau extrêmement grave pour l’humanité » et « les dépenses militaires excessives sont une offense aux pauvres ».

L’investissement dans l’armement n’est donc moralement acceptable que dans le cadre strict ainsi défini à propos de la guerre juste, et non dans une logique de profit ou d’agression. Ainsi, le pape François dénonce dans Fratelli Tutti (§262) « le scandale de l’armement », soulignant que « la paix ne se construit pas avec la peur des armes ».

Une approche éthique de l’investissement dans la défense, au sens de la DSE, exclura en particulier les entreprises dont l’activité principale concerne les armes de destruction massive (nucléaires, bactériologiques et chimiques), ainsi que celles produisant de façon significative « des armes qui infligent des effets traumatisants excessifs ou qui frappent aveuglément, ainsi que les mines antipersonnel » (Compendium § 510).

On exclura aussi celles vendant des armements pouvant être employés dans des conflits injustes au sens défini ci-dessus. Ceci concerne en particulier l’exportation à certains pays et peut s’étendre aux armes légères. On exclura enfin systématiquement les entreprises produisant des armes prohibées internationalement. 


Un discernement renouvelé dans le contexte géopolitique actuel

Le contexte européen, marqué par la guerre en Ukraine et le retrait relatif des États-Unis des enjeux de défense du continent, souligne l’urgence pour les États européens de renforcer leur autonomie stratégique.

La DSE ne condamne pas le recours aux armes dans ce contexte, mais appelle à un discernement rigoureux. Le Catéchisme de l’Eglise catholique (§2308) rappelle : « Les autorités publiques ont le droit et le devoir de recourir à des moyens armés pour repousser une agression armée contre la communauté civile dont elles ont la charge. » Le pape François lui-même a reconnu en mars 2022, à propos de l’Ukraine, que l’envoi d’armes peut être moralement acceptable, « sous certaines conditions » (Audience générale du 16 mars 2022).

Avis et recommandation 

S’agissant de l’investissement dans le secteur de l’armement, le Comité éthique de Mandarine Gestion recommande l’exercice un discernement éthique qualitatif, reposant notamment sur les critères précédemment évoqués, tout en encourageant les fonds à impact DSE, à l’instar de Proclero, par cohérence avec leur vocation, à éviter toute exposition directe au secteur de l’armement.